Examen civique pour le séjour et la naturalisation : un nouvel arrêté qui redéfinit l’assimilation

Publié le : 15/10/2025 15 octobre oct. 10 2025

Le Journal officiel du 12 octobre 2025 a publié l’arrêté du 10 octobre 2025 fixant le programme, les épreuves et les modalités d’organisation de l’examen civique désormais exigé non seulement pour la naturalisation française, mais aussi pour la carte de séjour pluriannuelle et la carte de résident .

Autrement dit, cet examen devient une étape incontournable pour toute personne étrangère souhaitant s’installer durablement en France.
Derrière cette uniformisation, se dessine une volonté politique : évaluer les étrangers sur leur “assimilation” à la République, au moyen d’un test standardisé aux accents très scolaires.

Trois mentions, un même dispositif : séjour ou naturalisation

L’arrêté signé par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau distingue trois mentions :
 
  1. Carte de séjour pluriannuelle,
  2. Carte de résident,
  3. Naturalisation.

L’examen prend dans tous les cas la forme d’un questionnaire à choix multiples (QCM) de 40 questions rédigées en français, réparties selon cinq thématiques :
 
  1. Principes et valeurs de la République,
  2. Système institutionnel et politique français et européen,
  3. Droits et devoirs des personnes résidant en France,
  4. Histoire, géographie et culture françaises,
  5. Vivre dans la société française .

La réussite nécessite 80 % de bonnes réponses, soit 32 sur 40, en 45 minutes maximum.

Un examen d’assimilation… ou un test de culture générale ?

Présenté comme un outil d’« évaluation de l’assimilation républicaine », cet examen repose en réalité sur un ensemble de connaissances académiques : histoire nationale, institutions, géographie, culture, voire gastronomie française.

Le référentiel de l’annexe I évoque par exemple :
 
  • les grands principes constitutionnels,
  • les symboles de la République,
  • le fonctionnement de l’Union européenne,
  • les fêtes nationales,
  • ou encore les artistes et monuments emblématiques.

Ce contenu soulève une ambiguïté fondamentale : l’évaluation porte moins sur l’adhésion aux valeurs de la République que sur la maîtrise d’un corpus de savoirs scolaires que beaucoup de Français, scolarisés en France eux-mêmes, peineraient à restituer.

En d’autres termes, on demande à des étrangers de prouver une forme d’“assimilation intellectuelle” déconnectée de la réalité de leur intégration sociale, professionnelle ou linguistique.

Un dispositif rigide et hautement encadré

L’examen est encadré par un règlement strict :
 
  • Contrôle d’identité obligatoire (titre de séjour, photo prise avant l’épreuve),
  • Surveillance directe et vidéosurveillance recommandée,
  • Interdiction des appareils électroniques,
  • Exclusion immédiate en cas de fraude, assortie d’une interdiction de repasser l’examen pendant deux ans .

Les épreuves ne peuvent se dérouler qu’entre 8h et 20h, sur support numérique, dans des centres agréés.
Cette mise en scène sécuritaire interroge : fallait-il vraiment appliquer aux candidats à la naturalisation ou au séjour pluriannuel, les mêmes protocoles que ceux d’un concours public ou d’un examen universitaire ?

Une conception problématique de l’assimilation

Le choix de regrouper sous un même examen les démarches de séjour durable et de naturalisation n’est pas neutre.
Il révèle une tendance à fusionner les logiques d’intégration et de naturalisation, comme si toute présence prolongée sur le territoire impliquait de passer un examen d’adhésion culturelle et historique.

Or, l’intégration — au sens du droit et de la sociologie — ne se résume pas à un savoir encyclopédique.
Elle se construit dans l’emploi, la langue, la participation à la vie collective, le respect des lois.
Lier le droit au séjour à la réussite d’un QCM sur l’histoire ou la géographie de la France revient à transformer l’intégration en concours de culture générale.

Un instrument politique plus qu’un outil d’intégration

Ce nouveau dispositif s’inscrit dans une évolution du droit des étrangers marquée par la moralisation de l’accès au séjour :
chaque étape — contrat d’intégration républicaine, niveau linguistique, entretien préfectoral, et désormais examen civique — devient un filtre supplémentaire.

Sous couvert de pédagogie républicaine, l’administration renforce son pouvoir d’exclusion.
On évalue des savoirs théoriques au lieu d’accompagner des parcours de vie.
Ce glissement confère à l’examen civique une fonction symbolique : celle de réaffirmer une frontière entre les “bons intégrés” et les autres.

Pour aller plus loin

Le cabinet Avec Vous Avocats, spécialisé en droit des étrangers et de la nationalité, accompagne les personnes concernées par ce nouvel examen civique — qu’il s’agisse d’une demande de carte de séjour pluriannuelle, d’une carte de résident ou d’une naturalisation.

Notre approche : comprendre les nouvelles exigences administratives sans renoncer à rappeler que l’intégration ne se mesure pas à un QCM...

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